Ce mercredi 15 janvier, j’ai participé à une réflexion des députés socialistes, républicains et citoyens autour du rapport de mon collègue Laurent Grandguillaume, député de Côte d’Or, relatif aux Entreprises et entrepreneurs individuels intitulé « Passer du parcours du combattant au parcours de croissance ».

Les entrepreneurs individuels constituent une composante importante du tissu économique : les artisans, commerçants et professions libérales étaient près de 2,7 millions en 2011, et les micro-entreprises « pèsent » économiquement autant que les PME et que les entreprises intermédiaires. Elles jouent donc un rôle de premier plan en matière d’emploi, de création de richesse et de redressement économique. Cependant, les entrepreneurs individuels appellent depuis longtemps de leurs vœux un allègement des contraintes administratives qui entravent leur développement. La création du régime des auto-entrepreneurs (AE) en 2008 a démontré l’impact positif de procédures administratives réellement simples en matière de création d’entreprises. Mais, dans le même temps, elle a induit des réactions négatives des autres entrepreneurs face à ce qu’ils considèrent comme un régime privilégié de manière inéquitable débouchant sur une distorsion de concurrence en leur défaveur. En effet, il s’agissait d’un dispositif supplémentaire plutôt qu’une simplification pour tous.

Le Gouvernement a souhaité prendre en considération les attentes exprimées par l’ensemble des parties prenantes. Á cette fin, Sylvia Pinel, Ministre de l’Artisanat, du Commerce et du Tourisme, a présenté le 21 août dernier en Conseil des ministres un projet de loi sur l’artisanat, le commerce et les très petites entreprises. Par ailleurs, Thierry Mandon, Député de l’Essonne, a remis un rapport sur la simplification à destination des entreprises, qui liste une série de propositions ambitieuses. C’est dans ce contexte et dans le cadre du choc de simplification annoncé par le Président de la République que le Premier ministre a confié à Laurent Grandguillaume une mission visant à explorer des voies d’une rénovation ambitieuse pour faciliter le développement des activités des entrepreneurs individuels. Pour passer en quelque sorte d’un parcours du combattant à un parcours de croissance.

Après une large concertation, celui-ci propose des pistes de simplifications audacieuses tant en terme de simplification que de construction d’un parcours de croissance pour les entrepreneurs.

Le rapport rappelle la situation illisible et potentiellement inéquitable à laquelle sont confrontées les personnes qui veulent créer une entreprise.

En effet, la correspondance entre un statut juridique et les régimes fiscaux et sociaux associés s’est peu à peu complexifiée. La « liberté » de choix de son régime fiscal amène souvent l’entrepreneur à définir la forme juridique de son activité en fonction de critères d’optimisation fiscale et sociale plus qu’en fonction de son projet et des conditions de sa mise en œuvre. À l’illisibilité du système se surajoute donc une atteinte à l’équité, des activités similaires pouvant se traduire par des prélèvements différents.

Le rapport ouvre des pistes de simplification et de réforme du cadre de l’entreprise individuelle qui visent à la fois à sécuriser l’entrepreneur, à simplifier ses formalités et les modalités d’acquittement de ses charges sociales et fiscales, à améliorer sa protection sociale et à protéger son patrimoine personnel.

La mission a travaillé sur un scénario permettant de répondre à quatre principes qui doivent guider le cadre de la création d’entreprise : la simplicité, la lisibilité, l’équité et la fluidité, c’est-à-dire la possibilité d’évoluer facilement d’une forme d’activité à une autre en fonction des nécessités/opportunités. Á ces quatre principes, elle propose d’en ajouter un cinquième qui est la neutralité vis-à-vis de l’équilibre des finances publiques.

Pour atteindre ces objectifs, elle propose de constituer un statut juridique unique pour l’Entreprise Individuelle, défini par des traits constants s’appliquant à deux régimes différents, forfaitaire (simplifié) ou réel (de droit commun) dont les caractéristiques seraient différenciées selon le niveau d’activité, avec des obligations déclaratives et des régimes fiscaux et sociaux respectifs adaptés.

Le rapport traite de la question du statut juridique des entrepreneurs individuels (1), pour en déduire les régimes applicables en termes fiscaux et sociaux (2). Il évoque également l’accompagnement des entrepreneurs aux différentes étapes de leur activité (3), les sujets de financement (4), la question des évolutions perceptibles entre salariat et entrepreneuriat est abordée (5), celle de la qualification et des assurances (6), et enfin les modalités de mise en œuvre de ce chantier de rénovation.

Les TPE sont une chance pour notre pays. Elles représentent la France des solutions. Ce sont celles qui, dans les territoires, prennent des risques, innovent, créent et développent. Les TPE représentent une des clés de l’objectif de réduction du chômage car elles sont porteuses d’emplois durables et non-délocalisables.

Consulter l’intégralité du rapport ici.

Liste des recommandations du rapport

Recommandation n°1 : Créer un statut juridique unique d’entreprise individuelle, dotée de la personnalité juridique et disposant de son patrimoine propre.

Recommandation n°2 : Rendre applicable pour ce nouveau statut juridique d’entreprise individuelle les dispositions du code de commerce, en excluant celles qui découlent de l’existence d’associés et en adaptant les autres, le cas échéant, aux risques liés aux différents volumes d’activité.

Recommandation n°3: Créer un registre d’information légale si c’est nécessaire juridiquement. Dans ce cas, le distinguer du RCS et veiller à la simplicité de son utilisation et à la modicité de ses coûts d’usage.

Recommandation n°4 : Adapter le formalisme attaché à l’entreprise individuelle à l’importance de son activité.

Recommandation n°5 : Prévoir par défaut un patrimoine nul pour l’entreprise individuelle, associé à une solidarité personnelle de l’entrepreneur.

Recommandation n°6 : Prévoir l’insaisissabilité par défaut de l’habitation principale pour tout entrepreneur individuel.

Recommandation n°7 : Préserver la simplicité en considérant par défaut l’habitation principale comme un tout, et prévoir une information des créanciers selon un formalisme proportionné aux enjeux financiers des biens affectés.

Recommandation n°8 : Faire disparaître toutes les autres formes juridiques de société unipersonnelle, dans la mesure du possible et sous réserve que les contraintes administratives induites ne soient pas disproportionnées avec la réalité des entreprises individuelles.

Recommandation n°9 : Proposer uniquement deux régimes fiscaux et sociaux aux entrepreneurs :

un régime réel et un régime simplifié (forfaitaire).

Recommandation n°10 : Créer un impôt sur les entreprises (IE) équivalent de l’impôt sur les sociétés, applicable aux bénéfices de l’entreprise individuelle.

Recommandation n°11 : Lancer la réflexion de la rationalisation des organismes sociaux de recouvrement.

Recommandation n°12 : Simplifier les cotisations sociales en régime réel en début d’activité en permettant une déclaration trimestrielle.

Recommandation n°13 : Pour les entrepreneurs au régime réel, réduire significativement les cotisations minimales et assurer des droits minimaux de deux ou quatre trimestres validés par an pour la retraite.

Recommandation n°14 : Retenir le revenu calculé par abattement sur le chiffre d’affaires comme assiette des cotisations sociales des entrepreneurs individuels au régime du forfait.

Recommandation n°15 : Ne pas accorder des droits contributifs aux entrepreneurs qui n’ont pas cotisé le moindre euro.

Recommandation n°16 : Sous réserve d’une évaluation précise des impacts induits, remplacer l’option pour le prélèvement forfaitaire libératoire par une option pour l’acompte.

Recommandation n°17 : Pour les entrepreneurs au régime forfaitaire, remplacer la CFE par une

Contribution économique territoriale proportionnelle au chiffre d’affaires.

Recommandation n°18 : Pour tous les entrepreneurs, remplacer la contribution à la formation professionnelle (CFP), forfaitaire, par une cotisation proportionnelle et plafonnée, dont le recouvrement serait unifié et confié au RSI.

Recommandation n°19 : Imposer l’utilisation de la voie électronique pour les déclarations et les paiements des impôts et cotisations des entrepreneurs au régime du forfait.

Recommandation n°20 : Lors de la création d’une entreprise individuelle, prévoir une déclaration d’intention, avec immatriculation provisoire, en amont de la première déclaration de chiffre d’affaires. Les droits sociaux ne seraient ouverts qu’à compter de la première déclaration de chiffre d’affaires.

Recommandation n°21 : Inciter les entrepreneurs au régime forfaitaire qui dépassent un certain chiffre d’affaires à être suivi par un organisme de gestion agréé (ou équivalent).

Recommandation n°22 : Construire dans chaque région, une politique en faveur de l’entrepreneuriat, en lien avec l’ensemble des acteurs de l’accompagnement.

Recommandation n°23 : Unifier le portail internet public pour l’information et pour la création des entreprises.

Recommandation n°24 : Construire un stage préparatoire à l’installation (SPI) pour les activités artisanales modernisé et personnalisable.

Recommandation n°25 : Détecter et prospecter les entrepreneurs au régime simplifié dont le niveau d’activité les rapprochent du régime réel pour leur proposer un accompagnement personnalisé.

Recommandation n°26 : Lancer une grande étude sociétale sur l’entrepreneuriat d’aujourd’hui afin d’alimenter le débat public et politique.

Recommandation n°27 : Constituer un comité de pilotage de la réforme de l’entrepreneuriat individuel, associant les parties prenantes, et un comité opérationnel, chargé de préparer et d’assurer le suivi de la mise en œuvre des décisions.