J’ai présenté à l’Assemblée nationale ce jeudi 2 octobre, au terme de trois mois de travaux, mon rapport d’information sur le CICE. Ce rapport a été adopté à l’unanimité.

Un solde du commerce extérieur se dégrade depuis 10 ans, les marges d’entreprises en baisse depuis 2008 et un taux de chômage trop élevé imposaient d’agir vite. C’est ce que le gouvernement et le parlement ont fait. Le mécanisme  du CICE vise à alléger le coût du travail pour les salaires compris entre 1 et 2,5 SMIC.  Il s’agit de concentrer l’effort de soutien aux entreprises sur les niveaux de rémunération où l’emploi est le plus élastique à son coût, afin de concilier renforcement de la compétitivité et développement de l’emploi.

Le choix d’un mécanisme de crédit d’impôt a permis d’agir rapidement tout en respectant les contraintes budgétaires des finances publiques. Toujours pour aller vite, un mécanisme original de préfinancement du crédit d’impôt a été immédiatement mis en place : il permet à une entreprise de bénéficier de manière anticipée du montant de crédit d’impôt, en cédant à un établissement de crédit la créance encore « en germe ». Des outils de contrôle ont été créés afin de s’assurer que le CICE ne puisse servir à une hausse des dividendes ou à une augmentation des rémunérations des dirigeants. Les représentants du personnel ont été dotés d’un pouvoir d’alerte sur la conformité aux affectations prévues par la loi et un comité de suivi a été mis en place.

Une évaluation encore prématurée, mais un premier bilan d’étape globalement positif

C’est dans ce contexte et moins de deux ans après la mise en place du dispositif que j’ai mené ma mission.

Procéder à une évaluation à proprement parler serait prématuré. De fortes difficultés méthodologiques et pratiques ne le permettent pas. Elles sont liées, tout d’abord, au mécanisme du crédit d’impôt  et au décalage entre l’année sur laquelle le CICE est calculé et celle où les entreprises en bénéficient effectivement. En effet, le crédit d’impôt n’atteindra son plein régime qu’en 2015.

De plus, des incertitudes théoriques rendent aléatoires aujourd’hui l’utilisation des prévisions macroéconomiques sur les effets du CICE à l’aide de modélisations. Ces réserves étant posées, il est par contre possible de dresser un bilan d’étape de la mise en œuvre du CICE

Celui-ci apparaît globalement positif.

La créance constatée en septembre 2014 s’élève à 8,7 milliards et à ce jour les entreprises ont d’ores et déjà bénéficié d’un montant de 5,15 milliards d’euros au titre du CICE. Le préfinancement est monté en charge de manière efficace. Bpifrance avait accordé, en juin 2014, 1,8 milliard d’euros à ce titre.

Enfin, les premiers effets de court terme perceptibles du crédit d’impôt sur l’économie sont bien réels. Au-delà des effets sur le taux de marge des entreprises dans une conjoncture dégradée, le CICE a notamment d’ores et déjà permis, selon les statistiques INSEE, de stabiliser la hausse du coût du travail  et devrait faire sentir ses effets sur l’emploi d’ici la fin de l’année. C’est donc un constat globalement positif qui peut être établi : le CICE est dans l’ensemble connu des entreprises, qui pour n’ont pas hésité à y recourir, et jouent le jeu.

J’ai tenu à intégrer à ce rapport quelques propositions. En premier lieu, si la campagne de communication menée sur le crédit d’impôt a été soutenue et efficace, des incompréhensions et un manque d’information persistent dans certaines entreprises. Certains bénéficiaires potentiels du CICE ne savent pas encore que ce crédit leur est ouvert. Il conviendrait donc de fournir un effort supplémentaire de communication à leur intention

En outre, la traçabilité des utilisations du CICE devrait être renforcée. Je suis d’avis que le meilleur emplacement pour retracer ces usages est l’annexe comptable et que cela doit être explicitement précisé afin de permettre un meilleur suivi

Ensuite il convient de rapidement installer les comités régionaux de suivi, qui sont des relais essentiels pour que le pouvoir d’alerte des représentants du personnel soit réel. Enfin, d’un point de vue comptable, l’imputation sur les acomptes d’impôt sur les sociétés devrait être autorisée. Cette imputation est déjà autorisée pour le crédit impôt recherche, et permettrait d’accélérer la perception du crédit d’impôt par les entreprises.

Entreprises et associations

J’ai aussi souhaité faire une proposition concernant les organismes à but non lucratif, qui ne bénéficient du crédit d’impôt que pour la part de leur activité poursuivant des buts lucratifs. Parce qu’ils se trouvent parfois en concurrence avec des sociétés commerciales qui bénéficient elles du CICE, une hausse de l’abattement de la taxe sur les salaires a été inscrite dans la dernière loi de finances rectificative pour 2012. Mais cet abattement constitue un avantage moindre que le CICE. Afin de rétablir l’égalité de traitement entre secteurs lucratif et non-lucratif lorsqu’il ne fait aucun doute qu’ils sont en concurrence, ainsi en matière de marchés publics, il serait pertinent d’étudier la possibilité d’accorder aux organismes non-lucratifs un avantage fiscal qui compense ce différentiel.

Au delà de ces remarques et propositions, il reste essentiel d’assurer aujourd’hui une stabilité de la mesure, afin de favoriser son appropriation par les entreprises, condition de son efficacité.

le rapport est téléchargeable ICI